Samson, le nouveau pendulaire !
Article paru dans ULMiste n°16, décembre 2013
Samson, le nouveau pendulaire !
Il y 15 ans, un fin connaisseur nous disait que si un jour La Mouette se lançait dans l’ULM, ça frapperait fort ! A l’époque il n’en était pas question. Certes, La Mouette avait un pied dans le moteur via le paramoteur (dont quelques exemplaires volent encore), mais, surtout, il y avait Cosmos, entreprise « sœur » qui a changé depuis de mains pour devenir mexicaine. Nous avions il y a deux ans essayé le Samson, premier ULM biplace électrique à faire démonstration de sa viabilité, dont cinq exemplaires volent à travers le monde.
Aujourd’hui, nous avons devant nous sensiblement la même machine, mais avec un moteur thermique de 36 cv (contre 18 cv en électrique).
Pierre-Jean le Camus et Jean-Christophe Verdié
Il existe des machines spécifiquement taillées pour le voyage, que ce soit en neuf ou en occasion, suivant les évolutions techniques spectaculaires que réalise le pendulaire depuis trente ans. Gros confort, bonne autonomie, aile rapide et solide, etc. Il n’existe plus depuis longtemps, en neuf, de machine biplace uniquement dédiée à nous porter dans les airs pour un petit tour local, éventuellement élargi. Ce qui est en partie lié au fait qu’on ne trouve plus ni 447 ni 503 en neuf… Et, quand nos machines d’occasion sont dévolues à cet usage dont beaucoup de pilotes se contentent à leur grand bonheur, elles sont encore trop lourdes, trop rapides et, surtout, trop gloutonnes pour ce seul usage, car conçues pour un cahier des charges plus exigeant. Ce créneau du matériel simple, accessible, peu cher, uniquement destiné à voler, était jusqu’ici abandonné au paramoteur. Le succès de ce dernier est le signe que cela suffit à beaucoup et qu’ils n’ont pas besoin d’autre chose. C’est ainsi que La Mouette s’est engouffré dans la brèche et frappe très fort en proposant une machine simplement destinée à voler, avec bien sûr un tarif en rapport ! Nous allons voir qu’il ne s’agit pas d’un retour en arrière contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, mais d’un concept entièrement nouveau, qui n’avait jamais été proposé jusqu’ici !
Prenons l’exemple d’un néophyte désirant voler. Pour lui, l’image de l’ULM est peut-être, comme beaucoup, ce petit aéronef qui ne monte pas haut et tourne lentement en rond autour du village, puisque telle est bien l’image qu’en ont beaucoup de piétons. Par conséquent, c’est au moment d’apprendre qu’il découvre que, cerise sur le cône d’hélice, ce machin peut aussi voyager, être climatisé, transponder 7000, etc. Dans tous les cas, le cahier des charges initial est respecté, il y aura toujours moyen de tourner en rond, qui peut le plus peut le moins. Toutefois, il se peut et cela existe, que l’on ne veuille que s’élever dans les airs. A l’instar des 4x4 en ville, qui peut le plus peut certes le moins, mais moyennant des inconvénients que l’on ne découvre qu’à l’usage : encombrement, consommation, entretien, hangar, etc., pour ce qui nous concerne.
Si l’on veut simplement voler, le paramoteur est tout indiqué : moins cher à l’achat que les autres ULM, il se transporte dans le coffre de son auto et se cale dans un coin du garage, voire derrière le canapé de sa chambre d’étudiant. Pas de frais de hangar à prévoir, peu d’essence à consommer, un apprentissage et un pilotage présentés faciles, voilà ce qui attire autant de monde dans le milieu grandissant du paramoteur.
Toutefois, cet aéronef, pour magique qu’il est et restera, présente des inconvénients que l’on découvre à l’usage et qui font, sans doute, qu’il y a un si fort taux d’abandon dans cette pratique. Si l’on met en corrélation le nombre de machines vendues par les constructeurs en dix ans et le nombre de pilotes actifs à ce jour, on obtient un ratio de un sur sept ! Pour faire court et sans dénigrer, l’apprentissage n’est pas si rapide et facile (quand on veut être bien formé), le décollage n’est pas toujours garanti en fonction du vent et du niveau d’entrainement du pilote, il est d’usage de dire que le vol se mérite en paramoteur et il faut prévoir un peu de casse régulière (donc des frais), et le domaine de vol est vite assez limité, sauf à jouer un peu au-delà du raisonnable…
C’est notamment ce constat qu’a posé Laurent Thevenot. Déjà présenté en nos lignes, Laurent est le fils de Gérard Thevenot, qui avec son frère Jean-Marc a fondé La Mouette dès 1975, après avoir construit leur première aile en 74 (inspirée de la Seagull américaine, d’où le nom), ce qui en fait l’entreprise la plus ancienne du secteur ! Laurent, lui, est né dix ans pus tard. Autant dire que la voilure souple, il connaît ! Pour en remettre une couche, on peut aussi ajouter que sa mère, Sherry Thevenot, d’origine américaine, a fondé en 1988 le magazine Cross Country, bimestriel en langue anglaise qui fait toujours référence au niveau mondial en matière de presse du vol libre. Aujourd’hui ingénieur aéronautique et bien sûr pilote (par ailleurs en équipe de France delta), il a repris la « boitapapa », mais pour lui faire prendre une direction que nous devons suivre avec la plus grande attention. Le garçon est né en 1984… un œil nous regarde, et celui-ci est particulièrement perçant !
La Mouette a toujours innové. On lui doit, par exemple, le pliage en parapluie de nos ailes, les lattes rigides, le remorqué delta, entre autres. Or, avec ce Samson, Laurent innovait déjà en produisant le premier ULM électrique biplace au monde, pendant que d’autres biplaces s’annoncent toujours sans que personne ne les ai vu voler.
Ce faisant, La Mouette, qui ne fabriquait jusque-là que des ailes (et des châssis paramoteur fut un temps), devient de facto un nouveau constructeur d’ULM ! Le second fabricant français à produire à la fois les chariots et les ailes, après Air Création. Nous avons donc, désormais, deux constructeurs de pendulaires en France, ce qui, à l’heure où l’on nous dit que tout va mal, est encourageant. Nous avons certes d’autres fabricants de chariots, tels que CBB, Aquilair (en kit) ou DTA, ce dernier étant à cheval, ses ailes, construites en exclusivité par Ellipse, étant conçues et mises au point en collaboration avec l’équipe de Montélimar et selon leur cahier des charges.
La version électrique du Samson s’est vendue, selon Laurent, à cinq exemplaires. S’il nous en annonçait 30, le doute serait permis, donc ce chiffre nous semble crédible. Ce n’est pas foudroyant, précisément parce que, pour le moment, les batteries disponibles sur le marché ne foudroient guère… ça va venir, nous assure-t-on depuis des lustres.
Cahier des charges et concept
Nous avons vu quel esprit a animé la création du Samson. Entrons dans les détails. Nous avons précisé plus haut qu’il ne s’agit pas d’un retour en arrière, mais d’un concept novateur. Pourtant, à première vue, on croirait revoir un de ces ULM de « l’ère Magalonienne », comme disent certains (Roland Magallon est l’un des inventeurs du tricycle pendulaire à la fin des années 1970). Pourtant, les illustrations ci-contre montrent sans équivoque que cela n’a rien à voir : structures tétraédriques, gros moteur (peu puissant), pléthore de tubes, des ailes d’une surface démesurée qui volaient à 50 km/h maximum et n’étaient même pas pliables, sans parler du chariot, qui exigeait un hangar ou une remorque, le tout pesant 120 kg au minimum. Voilà ce que l’on avait au début de l’ULM.
Le Samson, lui, est un ULM pendulaire biplace qui pèse moins de 78 kg à vide, peut croiser à 110 km/h selon l’aile (on y vient !), est propulsé par 36 cv et se plie tant et si bien que le chariot entre, complet, dans une Toyota Aygo, laissant encore la place à deux occupants aux places avant ! De la voiture au décollage, il se passe moins de trente minutes en s’y prenant très mal !
On peut étudier la question sous tous les angles, compulser ses archives avec frénésie, y mettre toute la mauvaise foi du monde, on n’arrivera qu’à cette seule conclusion : une telle machine n’a jamais existé ! Encore moins au tarif de 10 000 €HT auquel elle est proposée dans sa version de base… en 1984 (prenons l’année de naissance de Laurent Thevenot), un pendulaire biplace était facturé 35 000 Francs. Selon les indicateurs de l’INSEE, cela représente 9 615,58 € en 2012. Soit environ le même prix. A la nuance près que, pour le même prix qu’en 1984, on a beaucoup mieux aujourd’hui, comme pour tous nos jouets d’ailleurs.
Quel coût ?
Bien sûr, on ne peut comparer cette machine à aucune autre, puisqu’elle créé un nouveau créneau qui, nous n’en doutons pas, fera des émules chez d’autres fabricants. Pour reprendre le slogan de la Renault Twingo lors de son apparition en 1993 : « à vous d’inventer la vie qui va avec ! » Mais cette vie qui va avec est d’ores et déjà celle de nombre d’entre nous.
Prenons le cas d’un pilote pendulaire, nommons-le Bluchtre, qui se contente de vols locaux, éventuellement élargis, de temps en temps, à une balade à 100 km. C’est-à -dire, soyons honnêtes, une grande part de pratiquants, ce qui n’a rien de déshonorant. Disons qu’il part sur une machine biplace d’occasion à 5000 € et vole, comme tous, seul à bord la plupart du temps. L’appareil pèse 170 kg à vide, le chariot n’est pas pliable, est poussé par un moteur qui consomme 12 l/h en croisière en solo à 80 km/h et se trouve, à ce tarif, en fin de potentiel.
Notre ami devra prévoir une place de hangar, le pliage des « grosses » machines étant présenté si fastidieux qu’il ne tente même pas l’expérience. Il devra aussi prévoir, dans les 100 heures qui viennent (donc dans les deux ans), une révision moteur et aile.
Moyennons le hangar à 100 € par mois (entre 50 € en province et 250 € en région parisienne). Nous sommes à 1200 € par an. Dans les deux ans, il devra prévoir au moins 2000 € de révision aile et chariot, soit 1000 € par an. Côté carburant, 12 l/h x 100 heures = 1200 l, soit, au prix actuel de 1,40 € par litre, 1200 x 1,40 = 1680 €, soit 840 € par an. Nous sommes donc à un total de 1200 € hangar + 1000 € révisions + 840 € carburant = 3040 € par an, hors consommables d’usage (petit entretient, etc.). En deux ans, notre ami aura dépensé plus que le prix initial de sa machine uniquement pour la faire voler : 2400 € hangar + 2000 € révisions + 1680 € carburant = 6080 € pour 100 heures. Mais en réalité, la machine de Bluchtre présente encore une valeur résiduelle de 4000 €, nous sommes donc à 6080 (frais généraux) + 1000 (perte de valeur) = 7080, soit 7080 € / 100 h = 70,80 € par heure de vol.
Voyons maintenant le cas de Glloq. Lui achète un Samson à 12000 €TTC, le déplie en 20 minutes avec l’habitude et ne loue donc plus qu’un infime place de hangar pour son aile pliée (s’il ne possède pas une berline). Nous avons interrogé quelques propriétaires de hangar, 200 € par an semble être ce qui serait demandé. Nous sommes donc à 400 € pour deux ans. La machine est neuve, il n’y a donc aucune révision à prévoir sur deux ans et 100 heures. En solo, elle consomme 6 l/h à 80 km/h (avec la petite aile). Côté carburant, nous sommes donc à 100 h x 6 l = 600 litres, soit : 600 l x 1,40 € = 840 €, donc 420 € par an. Le coût total, pour 50 heures dans l’année, est donc de 200 € hangar + 0 € révisions + 420 € carburant = 620 € par an, hors consommables d’usage (petit entretient, etc.). En deux ans, notre ami Glloq aura dépensé : 12000 € achat + 400 € hangar + 840 € carburant = 13240 €. Mais en réalité, la machine de Glloq présente encore une valeur résiduelle de 9000 € (au plus pessimiste), nous sommes donc à 1240 € (frais généraux) + 3000 € (perte de valeur) = 4240 €, soit 4240 € / 100 h = 42,40 € par heure de vol.
Sur deux ans, Glloq volera à un coût horaire réduit de presque moitié par rapport à Bluchtre… et si Glloq doit aller voir son banquier ou sa grand-mère pour pouvoir sortir 12000 € d’un coup, il pourra prendre le présent article sous le bras, c’est cadeau !
Dans ULMiste n°12, nous avons expliqué comment, selon nous, un pendulaire biplace proposé à 15 000 € ne tiendrait pas la route face au marché de l’occasion (ce qui s’observe). Cela tient du fait que les prix de fonctionnement sont sensiblement les mêmes entre un neuf basique et une occasion. Ce n’est plus ici le cas.
Construction
Le Samson a été initialement prévu pour voler à l’électricité. Ce faisant, il devait être le plus léger possible. Il faut savoir qu’un aéronef motorisé est généralement dessiné autour du moteur qui lui est destiné. Sa masse et son encombrement étant deux données incompressibles, tout le reste devra suivre, notamment au niveau résistance… et inversement. Restons sur le thermique, sujet du jour. Le Polini Thor 250 de 36 cv pèse 19 kg, avec l’hélice. Par rapport, par exemple, aux plus de 50 kg d’un Rotax 447 de 40cv, on peut donc, autour de ce moteur, imaginer un chariot bien plus léger, chaque kilo de moteur supplémentaire nécessitant, en matière de résistance aux impacts, presqu’autant de tubes… sans compter les déports de masses, qui complexifient la donne. Nous sommes ici en monocylindre, donc très ramassé. Le bâti-moteur se résume donc à sa plus simple expression.
Le chariot est tout à fait classique et rappelle, en tous points, les Bidulm et Phase II de Cosmos (Laurent est aussi le neveu de Renaud Guy !). Tubes d’aluminium droits, ronds ou profilés, assemblés par goussets. Ainsi, ceux qui s’interrogent sur la solidité et la fiabilité de l’ensemble dans le temps peuvent observer ses ainés : ils ont très bien vieillis, pourtant soumis à des charges plus importantes.
La première version, sur laquelle nous avions volé dans notre numéro 3, proposait des jambes de train en carbone et une poutre verticale droite. Désormais les jambes sont en alu et la poutre est cassée, de telle sorte que le confort en place arrière, est supérieur à celui des précités. Pilote et passager conservent leur position très intime, qui reste largement supportable et fut, en tous cas, supporté pendant ben longtemps par les adeptes de la formule et revient à la mode dans la classe 6 ! Seul l’arceau de siège, articulé, est en acier, même la fourche vient en alu soudé. Les sièges sont constitués de mousses posées sur des sangles, classique. Les ceintures sont deux points. Pour l’usage en solo, un dossier rabattable est disponible, comme sur les Cosmos récents.
Le réservoir est un roto-moulé de motonautisme, qui sera bientôt remplacé par celui proposé par Polini et contenant 12 litres.
Seule différence de taille et de poids (au propre comme au figuré), par rapport à ses ancêtres : les roues ! A première vue, comme à deuxième et centième vue, ça semble bien léger… pourtant, c’est calculé pour et, sur les machines en circulation comme sur toutes celles de l’usine, il n’y a pas eu de problème à ce niveau-là . On s’y habituera, sans doute. Seul l’usage en tout-terrain sera sans doute limité, sur surface non herbeuse. En tous cas, voici un gain de masse et de traînée difficilement égalable. Le frein est en option et la commande de gaz est au pied droit, uniquement. Il n’y aucune console à instruments. Les moteurs de paramoteur ont toujours fonctionné sans cadran (comme les autres le pourraient, du reste), et un alti-vario de vol libre sanglé sur la jambe suffira largement (comme pour les autres, aussi, tiens…).
L’ensemble est très compact, de telle sorte que les masses sont très ramassées autour du centre de gravité, ce qui concourt à la fois à la stabilité et à la maniabilité.
Pliage : on retire le boulon qui tient le moteur et on dépose celui-ci, après avoir débranché les cinq éléments qui le relient au chariot : commande de gaz, carburant, trop plein d’essence, trop plein liquide de refroidissement et électronique ; on plie la poutre verticale puis on la bascule vers l’avant ; on sort les deux push-pins (broches à billes), qui solidarisent les jambes de train, que l’on replie vers l’avant. On soulève le paquet, qui pèse 23 kg, on le pose dans la Toyota Aygo louée pour la circonstance (on fait des essais complets, ou pas ?). Une fois le GMP dans la même Toy’ (hélice bipale bois Cadeillan non démontée), on y place encore deux personnes aux places avant. Le tout en 5 minutes ! Avons-nous dit que c’est du jamais vu ?
Dépliage : le même temps, l’aile en plus… justement, parlons-en.
L’aile
La Samson 19 a été développée spécifiquement pour cette machine. 19 m2, simple surface. 8 lattes par côté, dont les deux centrales restent en place, il n’y en donc que 14 à mettre en place. Elles sont retenues par des ficelles. Il y a des cales de vrillage aux extrémités (floatings) et l’aile pèse 36 kg, sous laquelle on peut suspendre 206 kg, puisque la masse maximale de l’ensemble a été établie à 242 kg. Rien de plus à dire sur la 19 m2.
Pour compléter la gamme, il est aussi prévu une aile de 14 m2 double surface et une de 12 m2, double surface également. Cette dernière n’était pas encore parfaitement aboutie au moment de notre visite, mais nous avons pu voler dessus, aussi parlons-en un peu. Il s’agit de l’Ipsos 12.9 adaptée à cet usage. Structure allégée, voilerie également (renforts en moins). La découpe reste la même que sur la 12.9. Résultat l’aile ne pèse que 38 kg. Moyennant cela, sa charge utile est bien sûr grevée, pas question de monter cette aile sur votre Phase II pour voler en biplace !
Jouons avec !
Nous avons dit dans notre numéro 3 que venir à Dijon file la pêche. Rien n’a changé ! Rendez-vous au petit matin, nous apportons les croissants et Jean-Michel Geay, qui partage désormais les anciens locaux de Cosmos avec Helite (airbags), offre le café. Le temps que Laurent se prépare et nous voici sur le terrain de Darois, d’où sont sortis, notamment, tous les Robins qui volent dans le monde. Nous montons la machine : 5 minutes pour le chariot, 10 minutes pour l’aile, puis encore 5 minutes pour assembler le tout, faire le plein et une prévol, bien sûr facilitée par l’accessibilité de touts les éléments. 20 minutes. Pouvons-nous affirmer que nous mettons toujours moins de temps pour ouvrir le hangar, sortir les trois machines qui sont devant la nôtre, les rentrer, fermer le hangar, faire le plein et la prévol ?
Ces 20 minutes de montage nous paraissent d’autant moins rédhibitoires que la manip est facile, même à une personne.
Comme il est d’usage, Laurent décolle en premier, pour s’assurer que tout va bien, que ça vole droit, tout ça. Le vent est travers piste, pour 15 à 20 km/h, ce qui n’est pas un problème pour ce type de machine, il suffit de prendre la largeur de la piste ! On compte : 16 mètres entre la mise de gaz et le décollage, en solo. Du sol, le moteur est assez bruyant, on est dans la technologie paramoteur.
Vol en solo histoire de se dégourdir et observer un peu, puis vol en biplace, Jean-Christophe, fidèle ULMiste, à l’arrière pour ce vol. Pilote : 85 kg équipé, passager 70 équipé, 10 litres de carburant, nous sommes donc à 85 + 70 + 7 + 78 = 240 kg.
L’installation à bord n’appelle aucun commentaire. Même à l’arrière, aucune contorsion à prévoir, le siège étant sensiblement à la même hauteur que sur certains pendulaires biplaces… à l’avant ! On enjambe, on s’assied, on s’attache. Il faut beaucoup reculer la tête avant de cogner la poutre, contrairement aux Cosmos, qui n’offraient que quelques centimètres. A l’avant, rien à dire. Il y a un démarreur électrique (en option), mais la batterie pèche un peu, (Polini y travaille), on lance donc à la main, sans souci. Il n’y a pas de renvoi sur la poutre, on ne peut donc démarrer qu’en se tenant debout à côté. Dommage. Les vibrations sont plutôt bien amorties (pour un monocylindre) et le ralenti se tient bien. L’embrayage centrifuge fait son office. Le roulage est bien sûr assez ferme, il n’y aucune suspension et les pneus sont de type bicyclette !
Nous décollons en 5 secondes et environ 35 mètres. Le basculement latéral est bien maîtrisé, en revanche l’assiette du chariot nous semble un peu trop cabreuse. Le taux de montée, en poussant légèrement la barre, s’établit à 1,9 m/s, ce qui est largement suffisant pour prendre suffisamment de hauteur avant de passer les forêts qui entourent le terrain au nord et à l’est. La vitesse de compensation s’observe aux alentours de 45 km/h en biplace, tandis que la vitesse maximale approche les 80 km/h. La vitesse minimale, quant à elle, descend largement sous les 30 km/h. Nous avons donc bien les performances des débuts de l’ULM, voire mieux en vitesse max, mais avec un concept entier et, surtout, un moteur que le fabricant donne pour consommer 7 l/h au régime maximal, ce qui nous paraît tout de même un peu optimiste et mériterait d’être vérifié.
L’aile, très maniable bien entendu, est plutôt neutre spirale, mais manque un peu de rappel sur les deux axes, tout en offrant une précision acceptable. Un léger lacet inverse se fait ressentir à la mise en virage
Le décrochage est un non événement, on parachute tranquillement et la récupération est immédiate. Le tout reste très sécurisant et donne simplement envie de jouer en local, voire en basse hauteur…
Nous n’avons pas poussé nos tests et prises de mesure aussi loin que sur d’autres machines, car cela ne se justifie pas dans le contexte et, surtout, parce qu’il n’y a rien d’équivalent.
La 12
Cette aile n’était pas encore aboutie, mais elle l’est depuis note essai. Nous avons mené le premier vol en biplace, qui n’avait pas été tenté jusqu’ici. Sans nous étendre sur les qualités de vol, les performances sont flatteuses : un taux de montée supérieur à celui observé avec la 19 (plus de 2 m/s), une vitesse maximale qui dépasse les 110 km/h et une vitesse minimale qui reste ridiculement basse (autour de 35 km/h en solo) et permet toujours de poser travers piste si le besoin s’en fait sentir. Jean-Christophe, qui cumule près de 1000 heures sous un Phase II 12.9 503 et possède également par ailleurs un Dragonfly, a immédiatement retrouvé ses marques. Bien sûr, le pliage-dépliage de l’aile sera un plus long que la 19, nous avons ici 15 lattes par côté.
Quel usage ?
Une fois le concept bien compris et la machine testée, se pose la question de l’usage qui peut en être fait.
Voyage : nous avons vu que cette machine ne s’y destine pas. Toutefois, tout reste possible, on peut faire le tour du monde à Mobylette, moyennant des inconvénients bien réels. Si donc votre ambition est de faire un tour de France chaque mois, ce n’est pas la machine idéale. Quoique.
Vols locaux : cet appareil est parfaitement destiné à cela, en offrira plus que le paramoteur et autant que la machine d’occase, si ce n’est plus, car le contact avec le vol est encore plus direct et pour beaucoup moins cher !
Tout-terrain : nous avons vu que les petites roues peuvent générer quelques doutes sur une utilisation en hors-piste. Pourtant, nous avons volé à Bass-Ham l’an dernier, sur un terrain fort mal pavé qui, en dehors de la Biennale paramoteur, est un pré à vaches. Il sera donc possible d’aller poser derrière chez le copain pour l’apéro, d’autant plus facilement qu’on pose sur quelques mètres avec le petit vent qui va bien !
Baptêmes : un tel usage nous semble être parfaitement adapté. Outre que l’objet attire spontanément la sympathie, le faible investissement (à comparer au neuf) et les très faibles coûts d’exploitation en font une machine parfaite pour les baptêmes. Mais attention ! Il faudra bien briefer les passagers qui « font l’oiseau » avec leurs bras : l’hélice est si proche derrière que le bras peut y passer, inconvénient majeur !
Ecole ? Et pourquoi pas ? Un instructeur allemand enseigne sur cette machine, en électrique, et s’en trouve satisfait : les formations sont très rapides et tout le monde est content. Si votre business modèle consiste à faire tourner le compteur et que vous ne savez plus former un pilote de pendulaire en moins de 20 heures, alors, évidemment, il y aura des déceptions…
Domaine de vol, donc sécurité, limités ?
Voici un argument qui revient assez souvent sur des machines frêles et légères. Pourtant, l’observation des faits tend à a contredire de façon assez entière. Un grand constructeur de renom admet effectuer ses vols d’essais matinaux en commençant par les ailes chargées de faible surface, pour terminer, quand la convection se réveille, avec les ailes plus faiblement chargées aux vitesses plus basses. Nous-mêmes, d’ailleurs, nous sommes surpris à voler avec le Samson dans des conditions de vent et convection dans lesquelles nous aurions interrompu nos essais sur une machine plus grosse. Autre observation : les pilotes de delta, qui suspendent 100 kg sous une aile de 15 m2, volent dans des conditions qui clouent les pilotes pendulaires à la buvette… Laurent résume parfaitement la situation auprès d’un curieux qui, justement, passe par là et s’interroge : « sur ce type de machine, tu as certes moins de défense que sous un truc plus gros, mais tu n’en as pas besoin ! » A moins de 300 kilos au décollage et en roulant à maximum 30 km/h, une éventuelle boulette aura autant de conséquences qu’une chute à vélo, quand le même gag à 472,5 kg et 80 km/h finira en stage chez Urgo ! Ainsi, même le critère sécurité pèse en faveur du léger et lent !
Quant aux performances, si l’on revient à la comparaison avec de l’occasion, elles sont assez semblables avec la 12 et pas si éloignées avec la 19.
Bilan
S’agissant, encore une fois, d’un créneau vierge, nous attendons, avec une grande curiosité, de voir ce que cela donnera. Si l’on s’en tient au seul prix et qu’on le compare à l’offre en neuf, le pendulaire biplace le moins cher que nous avons essayé jusqu’ici se facture 25 000 €. Le Samson vous en demandera la moitié. Ses qualités sont-elles divisibles d’autant ? Pas si sûr, nous pensons même que, pour deux fois moins cher, on a bien plus que deux fois moins bien ! D’autant que, pour sensiblement le prix actuel d’un monoplace, on peut être livré, en 4 semaines, de ce chariot biplace avec deux ailes !
Et, pour finir (enfin !), le jour où l’électrique fonctionnera mieux et sera moins cher à l’achat, on pourra basculer du fossile à l’atome en quelques minutes !
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