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Air Création Pixel iFun13

Article paru dans ULMiste n°19, mars 2015

 

Pixel, bien plus qu'un Racer 2.0

 

Voilà plus d’un an que le Pixel est sorti et nous voici enfin à Aubenas pour en mener un essai complet, sur trois jours. Si la iFun 16 fut essayée en même temps (voir notre précédente livraison), le Pixel a bénéficié du même traitement, voire plus, puisque nous avons pu mener une comparaison avec un Racer Fun 14 447, afin de répondre à la question que tout le monde se pose : quelle différence avec un Racer ?

 

Pierre-Jean le Camus

 

A première vue, pas grand-chose de différent. Bien sûr, ce qui saute aux yeux est le moteur : le gros petit bicylindre Rotax laisse place à un minuscule mono cylindre qui nous rappelle avec une joie mêlée d’inquiétude les MBK à refroidissement liquide de nos adolescences boutonneuses des années 80.

 

Moteur

 

De plus, ce moteur est un Polini ! Le graal absolu des « préparateurs » que nous pensions être, « préparations » qui ne consistaient le plus souvent qu’à rendre le moteur plus bruyant, plus complexe et plus lourd, pour un gain de performances passablement imaginaire. Mais enfin, voilà quelques années, Polini a décidé d’investir le marché du paramoteur. Pas seulement parce-qu’il leur semble porteur, mais aussi, voire surtout, pour la possibilité, quasi exclusive, d’encore utiliser un carburateur. Sur la terre ferme ou sur l’eau, c’est désormais interdit, du moins chez nous, la pollution ne traversant pas les frontières. En neuf, entendons-nous. L’aérien est le seul domaine où l’on peut encore produire un moteur deux-temps à carburateur pour un prix de revient, donc final, raisonnable. Les faibles volumes de ventes ne permettent pas encore à un industriel de proposer une injection directe, les droits sur la technologie étant très élevés.

Air Création a retenu ce motoriste, parmi les nombreux du marché paramoteur, pour deux raisons. D’une part, le cahier des charges en matière de puissance et de couple correspondait. D’autre part et c’est le plus important pour un constructeur de l’envergure de Air Création : la fiabilité. Non pas du moteur en lui-même, qui pour le moment ne s’avère ni plus fiable ni moins fiable que les plus sérieux moteurs de paramoteur, mais du fabricant. Polini est une grosse boîte et le service-après vente a plus de chances d’être assuré pendant des années qu’avec un fabricant plus modeste. Pour les Ardéchois, ce point prime sur tous les autres.

Deux versions sont disponibles. Le Thor 200, 193 cm3 de 29 cv à 7 400 trs/min refroidi par air forcé sur le Pixel et le Thor 250, 244 cm3 de 36 cv à 7 500 trs/min refroidi à eau sur le Pixel dit XC. XC pour « cross-country », nous allons voir. Le premier se lance à la ficelle via un ingénieux système dit « Starter flash » : on tire trois coups, doucement, puis un coup sec ; ça part au quart de tour sans effort, depuis la place pilote, Air Création monte la poignée au-dessus de la tête, classiquement. Le 250, lui, bénéficie en série du démarreur électrique et en option d’un double allumage. On démarre à la clef, on ouvre le circuit d’allumage (donc on coupe le courant) en appuyant sur un bouton au tableau de bord. Le paramoteur est habitué à cette configuration, il nous faudra nous y faire ; mais attention aux fausses manips…

L’embrayage centrifuge est de série sur les deux moteurs, ce qui est un avantage au démarrage, mais un inconvénient moteur coupé, la finesse étant dégradée par le disque de rotation de l’hélice. Mais on a au moins l’avantage de bénéficier de la même finesse moteur en route et coupé. Tous deux sont à réducteur mécanique et un magnifique pot accordé donne au paquet un aspect « course » des plus heureux.

 

Le tricycle

 

La structure est la même dans toutes les configurations. La version de base, sans autre nom que « Pixel », est motorisée par le Thor 200 et dépourvue de tout artifice à part un compte-tours compteur horaire. Les coloris, sur toutes les versions, sont au choix, pourvu qu’on opte pour du gris et rouge ! Le gris des tubes, pour lequel Air Création a opté depuis une dizaine d’années, a une raison : avec le temps, les éclats qui apparaissent dans la peinture se voient beaucoup moins à l’œil nu qu’avec des tubes d’autres couleurs, l’ensemble conserve donc un aspect neuf plus longtemps.

De série sur les trois versions :

- ceinture trois-points de type automobile à enrouleur ! Des années qu’on en rêvait, la voici enfin ! Sur un biplace, la chose est difficilement imaginable en place avant, mais serait possible pour le passager. En monoplace, la question de se pose pas

- fourche réglable en quatre positions pour s’adapter à toutes les morphologies, pourvu qu’on soit dans les moyennes

- frein sur la roue avant

- gaz au pied droit

- réservoir gradué 16 litres

- siège réglable dit « baquet »

- garde-boue avant

- sacoche d’environ 15 litres derrière/sous le siège

- Miroir de visualisation du niveau de carburant.

 

En série sur le C :

- Thor 250

- température d’eau

 

En série sur le XC (ou option sur les modèles précédents) :

- tout ce que nous venons de voir, plus :

- flans latéraux en toile rigidifiée

- console coupe-vent

- gaz à la main

- MGL E1 : Compte-tours – Température d’eau – Compte horaire – Temps de vol – Charge batterie

 

En option sur toutes les versions :

- MGL altimètre - ventimètre

- parachute lancé main de 4 kg

- double allumage sur le 250.

 

Bien sûr, il est possible de faire évoluer son tricycle en y ajoutant les options des versions supérieures, mais un changement de moteur nécessitera une mise à jour des documents de navigabilité. La masse à vide de la version de base est de 85 kg, les options en ajoutent une dizaine. La masse maximale est de 230 kg, ce qui donne jusqu’à 145 kg de charge utile, carburant compris. Avec le plein de 16 litres, soit 11,2 kg, nous pouvons donc embarquer 133,8 kg ! Contrairement aux apparences, il s’agit d’un ULM parfaitement adapté aux bien-portants !

 

La géométrie du chariot ne varie guère de celle du Racer, si ce n’est par l’avancement du point d’ancrage à l’aile, nécessité par la moindre masse du moteur. Le Pixel est légèrement plus long. Des tubes alu assemblés par goussets et pièces de jonction mécano soudées constituent la base. Grosse différence d’avec le Racer, les jambes de train arrière sont métalliques et non plus en fibres comme sur le Racer (fabrication Arplast). Les roues arrière sont de faible diamètre, mais pour le moment il n’est pas prévu de proposer les grandes roues Alroc qui étaient en option sur le Racer, il est utile de le rappeler. Ceci dit, le diamètre intérieur est le même, contrairement au Racer qui exige de poser des entretoises. Autre particularité par rapport au grand-frère, le radiateur d’eau à l’arrière, avec le Thor 250. Enfin, l'arceau de siège est plus large sur le Pixel et s'adapte donc mieux à ceux qui sont montés en jante large.

L’ensemble est disponible prêt à voler ou en kit, aile comprise. Lequel kit est absolument exemplaire, comme nous le détaillons dans l’encadré.

 

L’aile

 

Comme vu lors de l’essai de la iFun16, il s’agit d’une « double-surface à transversales apparentes », comme les précédentes Fun mono et biplace. Comme sur la 16, le nez est ouvert et les extrémités fermées, Gilles Bru nous a fourni l’explication dans ULMiste n°18. 13 m² de surface alaire et 7 lattes par côté finissent le tableau. Tous les éléments sont accessibles et visibles et aucun réglage, à part la tension des lattes par quart de tour, ne viendra pénaliser le vieillissement.

 

Chez Air Création, on est bien reçu ! Que ce soit pour faire des essais destinés à la presse comme me voici, ou pas : le simple client, le passant égaré, sera tout aussi bien accueilli. Je l’ai testé il y a fort longtemps : âgé d’une vingtaine d’années et totalement inconnu dans l’ULM, je passais dans la région avec ma vieille 205 cabossée. Il était tout à fait manifeste que je n’allais pas signer un bon de commande ce jour-là. J’eus pourtant droit à tous les honneurs. Aujourd’hui, c’est la même, mais, nuance notable, pas moins de 5 machines flambant neuves m’attendent devant le hangar. Mission : jouer avec pendant trois jours. Il y a plus mal loti, mais c’est la vie que j’ai choisie. Outre les deux Skypper, trois Pixels sont à ma disposition, mais aussi, dans le hangar de Ardèche ULM plus au nord du terrain, un Racer 447 Fun14, afin de me faire une idée précise des différences. L’un des Pixels est encore plié (retour de Blois), je demande à le monter moi-même. Rien à signaler, c’est simple, évident, sans effort. Seul, l’opération me prend une vingtaine de minutes en comptant les photos, temps qu’il sera possible de réduire avec l’habitude. Au montage du chariot, on retrouve les vis et écrous qui ne demandent qu’à se perdre dans l’herbe, vieille habitude de Air Création (et d’autres), qui ne demande qu'à disparaître également.

 

Autre particularité que l'on retrouve aussi bien sur le Racer que sur le Pixel : la faible hauteur du chariot et du trapèze, plus courts de 25 cm par rapport à un biplace de la marque. Cette configuration réduit la traînée et le poids. Autres avantages, la plage d'incidence exploitable est plus grande et les débattements réduits. Mais quelques inconvénients, tels qu'une augmentation des effets de couple moteur et des efforts et une diminution de l'amortissement en tangage du couple aile – chariot. Les utilisateurs de XP11 ayant essayé la XP12 (ou inversement), le savent : c'est la même aile, mais la différence de hauteur du trapèze modifie son pilotage.

 

Volons !

 

La simple vie de ce jouet excite : on a juste envie de s'asseoir dessus et de le décoller, sans autre but que d'aller folâtrer dans les environs, s'envoyer en l'air en éprouvant d'avance le plaisir que procurent, à l'instinct, les choses simples. Les premiers vols consisteront en un test complet du XC. La prévol ne pose aucun problème, tout est accessible. L’installation à bord consiste à s’asseoir et attacher la ceinture, ce qui est d’autant plus aisé qu’elle est de type automobile. Contact, démarrage du moteur, mise en circuit des instruments, on attend que ça chauffe, ce qui en ces chaudes journées vient vite. L’hélice n’étant pas entraînée (embrayage), le seul bruit perceptible est celui du moteur. Un paramotoriste ne sera pas dépaysé, mais un ULMeux classique l’est : ding-ding-ding-brrring-ding-ding… il paraît qu’on s’y fera. A la mise en puissance pour le roulage, l’hélice se met en branle et on retrouve un son plus « aéronautique ». Les vibrations restent assez marquées quel que soit le régime. Les actions vitales sont des plus simples : je suis attaché dans l’avion, les commandes sont libres, le moteur tourne. Gaz ! La dernière fois que j’ai volé dans une machine de ce type, monoplace ultraléger typé « pulma » (ce qui n’est pas ici le cas, nous l’allons voir), c’était avec le Dragonfly. Les 18 petits chevaux tournant en quatre-temps s’ébrouent tranquillement et le roulage ressemble à celui d’un trois-axes ou d’un gros pendulaire à petite aile : on a le temps. Ici, rien à voir : on a le bon coup de pied au cul d’un deux-temps de 36 cv et l’ensemble décolle sur trois fois son envergure.

Je ressens une grande légèreté dans la barre, tout en constatant une bonne stabilité. Expédions le chapitre des performances mesurées : taux de montée 3,8 m/s (le constructeur relève 4 m/s mais je suis plus gras que les Ardéchois). Vitesse minimale de contrôle 46 km/h. Décrochage 40 km/h (environ) et vitesse maximale 111 km/h à 6500 tours par minute, il y a donc un excédent de puissance. Le tout sans effort. La vitesse de compensation oscille, selon le centrage (deux positions possibles), entre 65 et 75 km/h.

A la vitesse maximale, le saute-vent fait parfaitement son office. L’aile est stable spirale jusqu’à environ 30° d’inclinaison et légèrement instable au-delà. Le rappel au neutre est bien marqué dans demander d’effort considérable ni à pousser ni à tirer. Ce qui est certain, c'est que le "plaisirmètre" est au taquet ! Ceux qui viennent du paramoteur trouveront leurs marques, avec la possibilité de voler deux fois plus vite si nécessaire et ceux qui viennent de gros biplaces ne seront dépaysés que par le domaine de vol, bien plus permissif aux basses vitesses. Plus aucune vache ou posé en campagne ne fait peur, on veut juste se poser partout, ce qui est possible avec peu d'entraînement.

 

Décrochage

 

Ce point mérite un chapitre, car contrairement à l’habitude, nous ne pouvons pas dire qu’il est « sans souci ». Depuis longtemps, nous avons pris l’habitude de pendulaires qui, en statique, décrochent sans marquer d’abattée. L’ensemble parachute et, quand abattée il y a, elle est annoncée par un net durcissement de la barre en roulis et se traduit par un nez plongeant doucement. La iFun13, et contrairement à sa grande sœur la 16, marque une abattée très franche. Sans vraiment prévenir, tant les efforts sont faibles en toute configuration. Y compris en statique. Gaz réduits, descente stabilisée, poussé progressif de la barre, à environ 5 cm du tube avant, abattée. Nette, les boyaux remontent dans le placard ! Je recommence l’opération plusieurs fois et constate le même phénomène. En dynamique, bien sûr c’est encore plus marqué et en deviendrait amusant, dans les limites du raisonnable ! Pour ceux qui ont connu, on retrouve un peu le comportement de SX12II (je ne connais pas la SX12I), aile monoplace de Racer, double surface des années 1990. Ce n’est pas un défaut majeur de cette aile, mais il faut être prévenu. En tous cas, le signe que la basse vitesse est intégralement exploitable à l’atterrissage, ce qui n’est pas toujours le cas. L’aile retrouve seule sa ligne de vol, même en lâchant les mains quand ça s’écroule. En échangeant mes impressions avec l’usine et des utilisateurs comme je fais toujours lorsque c’est possible, notamment Samir Elari qui en déjà livré quelques-uns, il s’avère qu’en vieillissant et ce dès quelques dizaines d’heures, le phénomène s’estompe. La toile se détend, « prend sa place » et le décrochage retrouve la norme du pendulaire : simple parachutage en statique. Bon à savoir.

 

Précision, stabilité, turbulences

 

Je trouve la même grande précision et stabilité que celles observées sur la 16. Etonnant pour une aile de cette catégorie ! Point marquant, quand on tire sur la barre, la trajectoire est rectiligne, aucune tendance à vouloir restituer l’énergie emmagasinée par une ressource non pilotée. L’après-midi, un vol en conditions turbulentes confirme les impressions, c’est tout aussi facile que par temps calme. Il est même possible de thermiquer moteur coupé, le redémarrage étant des plus faciles !

 

Pixel

 

Modèle de base, avec le Thor 200 et sans le champignon devant les yeux. Bien sûr, la visibilité vers l’avant est améliorée, mais le bruit de la turbine de refroidissement et le démarrage à la main rendent l’ensemble moins « sexy », ce qui explique qu’à ce jour aucun n’a été commandé, à telle enseigne que le constructeur envisage de le retirer du catalogue. Les performances relevées sont quasi identiques, le taux de montée est légèrement inférieur, ainsi que la vitesse maximale. La moindre puissance est compensée par la moindre masse. En revanche le moteur toussote à mi-régime et à la mise en puissance, désagréable. Pour faire court, on peut dire que le Pixel, version de base, rappelle davantage un pulma, la vitesse maximale en plus. Aucun autre ne dépasse les 100 km/h, ni même s'en approche. A part cela et à la puissance près, ça fera le même boulot, ce ne sont pas les pendules qui font la performance ! L'absence de saute-vent ne choquera que ceux qui en ont pris l'habitude.

 

Comparatif Racer / Pixel

 

Il y a près de 20 ans, j’ai loué un Racer Fun 14 447, une grosse centaine d’heures. J’ai une bonne idée de cette machine. Toutefois, pour le sérieux de la comparaison, j’effectue un vol avec un Racer 447 Fun 14 disponible chez Ardèche ULM, l’école de Nicolas Coince dont le hangar est à cent mètres de l’usine. Ce Racer est l’un des derniers produits, il a peu d’heures et sort de révision. Il est donc en parfaite condition. Il appartient à Fabrice Aymard, en fin de formation et pas encore lâché sur son Racer lors de ma venue. Procédure : je sors les deux machines, j’effectue la prévol et je chauffe le 447. Puis je vais effectuer un protocole de test complet du Pixel XC, ce qui prend environ 15 minutes. Aussitôt posé, je redémarre le Racer et pars effectuer strictement le même vol. Bah les copains, il n’y a pas photo ! Ces deux machines, à part le fait qu’elles ont les mêmes parents et qu’elle sont toutes deux monoplaces, n’ont rien à voir !

 

Le Racer a quelques défauts, bien connus de ceux qui le proposent à la location ou comme machine de vols solo avant le brevet. La position de l’assise, tout d’abord, change de celle du biplace sur lequel on aura fatalement effectué sa formation initiale. Mais, surtout, le Racer se cabre assez considérablement à la rotation, gaz en grand. C’est assez déconcertant et il n’est pas rare, lors des premiers vols, de voir les Padawan du Racer réduire la puissance aussitôt la rotation, surpris qu’ils sont de voir l’horizon au niveau des hanches, ou presque. Avec le Pixel, ce point est corrigé et on trouve une attitude semblable à un biplace. La Fun 14 du Racer, très légère dans les mains, est beaucoup moins stable que la iFun 13. De telle sorte que la légèreté engendre un sur-pilotage prononcé au début. Avec la iFun, ce point est également lissé, on va sur-piloter un poil, mais moins longtemps, la grande précision de l’aile la rendant immédiatement compréhensible, bien qu'elle soit encore plus douce que la Fun 14 ! Ce qui sera vérifié dans les tests de stabilité et en légères turbulences. La Fun 14 se balade beaucoup plus, bien qu’elle soit plus ferme. Je mets ceci sur le dos des conditions, qui entre le vol du Pixel et celui du Racer, soit une dizaine de minutes, ont pu changer. Le lendemain matin, à la fraîche, nous partons voler de concert, Pixel et Racer, Gilles Bru et Jean-Luc Tilloy prenant un biplace pour les photos. Les conditions sont calmes, je prends un cap comme convenu et attends que le Racer se place à mes côtés, le biplace se débrouillant avec ses photos. Cependant que je reste droit sur mon axe, sans bouger, deux doigts sur la barre et l’autre main dans la poche (ça caille ce matin), je vois le Racer, à côté, qui oscille, monte, descend, zig-zague… Nicolas Coince, patron de Ardèche ULM, est un très bon pilote, de ceux qui ont beaucoup à m’apprendre. Je suis donc surpris qu’il ne parvienne pas à se coller proprement sur mon cap. De retour au sol, Jean-Luc me dit qu’il aurait fallu filmer la séquence : on voit ici la différence entre une aile stable et précise et une aile qu’il l’est moins. Car Nicolas affirme qu’il faisait ce qu’il pouvait pour suivre, mais que l’aile, de son côté, faisait ce qu’elle pouvait pour qu’il ne suive pas. Plus de 20 années séparent les deux et heureusement que ça progresse !

Revenons à mes tests. En précision au ras du sol, bien évidemment la iFun 13 montre un net avantage. En approche avec grosse prise de vitesse, essai que j’effectue pour mesurer la capacité de restitution d’une aile, la Fun 14 plonge, puis, une fois une certaine énergie emmagasinée, la restitue seule par une ressource, sans que je puisse piloter l’action, comme nombre d’ailes, du reste : on pique vers son point d’aboutissement et voilà que d’un coup on voit ce dernier disparaître sous les genoux, l’aile ayant décidé de restituer la vitesse en une trajectoire semblable à celle d’un avion de papier mal équilibré, en mode kangourou. Avec la iFun, fini : l’aile va là où on veut qu’elle aille sans broncher, quelle que soit la vitesse emmagasinée. Très bon point ! Les deux restituent à peu près autant, c’est-à-dire relativement peu, en vérité ; même après une finale tout tiré, donc à pleine vitesse, une centaine de mètres suffira pour toucher les roues et s’arrêter. Côté vitesses, en bas on se tient à peu près, en revanche les hautes vitesses sont supérieures avec la iFun, malgré la moindre puissance.

Le Pixel aurait-il donc tout bon face à un Racer tellement dépassé qu’on en viendrait à devoir le mépriser ? Pas si simple, j’ai trouvé au moins deux meilleurs points au Racer : le confort de l’assise, d’une part, que j’ai trouvé plus « cosy » que sur le Pixel, ce point n’étant pas partagé par quelques utilisateurs avec lesquels j’ai pu en discuter. Mis à part la position des pieds en vol, le maintient du dos m’a paru nettement meilleur sur le Racer, le Pixel ayant une sangle de réglage qui scie le dos, façon Cosmos. Autre point  discutable qui nourrit déjà des réserves : le moteur. A côté du bruit de crécelle et des vibrations du Polini, le Rotax 447 paraît une reine ! Un doux ronronnement, peu de vibrations, pour une poussée ressentie identique. A son avantage, le Polini, pèse et consomme moitié moins… mais enfin, objectivement et même si on s’habituera au Thor, on ne peut occulter ce point, en comparant sérieusement les deux. Enfin, le faible diamètre des roues arrière et leurs pneus « de brouette » (nous avons crevé deux fois en 24 h), limite quelque peu le hors-piste, mais c’est un choix délibéré du fabricant, la chasse au poids avant tout ! Il sera aisé de remplacer ces roues par des plus grandes, ou de changer les pneus pour des plus solides, voire même de monter des carénages.

Côté prix, ce n’est pas comparable puisque le Racer n’est plus produit, quoique… le Pixel est aujourd’hui vendu au même prix que l’était le Racer il y a quelques années, en monnaie constante. Et même moins cher, en kit. Or, pour le même prix, on a bien mieux à bien des égards. Et, surtout, en référence à notre article dans ULMiste xx sur le prix de nos jouets, le coût de fonctionnement varie, enfin, entre le neuf et l'occasion ! Un Pixel consomme deux fois moins qu'un Racer et son entretien coûte moins cher !

 

Quant au couplage d’un Racer et de l’iFun13, le dossier technique existe en 447, mais nous n’avons pas essayé, aucune machine identifiée n’étant disponible lors de notre passage. Mais selon ceux qui ont essayé, on trouve les avantages et inconvénients du Racer et la très nette supériorité, à tous points de vue, de l’iFun 13. Les heureux possesseurs de Racer peuvent donc réfléchir à un changement d’aile, moyennant tout de même 5 304 €TTC (TVA 20%), prête à voler et sans grand espoir de pouvoir tirer un bon prix de la Fun 14 en occasion.

 

Bilan

 

Nous avons été enchantés de cet essai, encore une fois. 25 clients à travers le monde ont, en une grosse année, acquis un Pixel. Exclusivement dans sa version XC, avec toutes les options. Le modèle de base, avec le Thor 200, n’a trouvé aucun acquéreur. Nous qui raillions la console à instruments en arguant du fait que ce même moteur, en paramoteur, se porte très bien sans aucun instrument, en prenons note : Air Création n’a fait qu’anticiper la demande, l’ULMiste veut des pendules, quitte à ce qu’elles ne servent à rien, voire à cette condition.

Contrairement à ce que le moteur pourrait laisser croire, il ne s’agit pas d’un pulma, mais d’un « vrai » ULM monoplace. Outre qu’aucun pulma ne vole à 110 km/h, la solidité de l’ensemble, calculé et construit selon les standards mondiaux les plus exigeants, en fait une machine qui durera longtemps et sera donc très vite en concurrence avec elle-même, aussitôt qu’il y en aura sur le marché de l’occasion. Enfin, chaque club devrait avoir un Pixel (ou une machine de ce type), dans son hangar, pour une seule raison : le pied inouï que l’on prend à son bord ! Aucun pilote ne descend du Pixel sans avoir la banane, ce qui ne s’observe pas toujours sur des machines plus grosses. Or, au départ, c’est pour ça qu’on vole !

 

 

Kit

 

Il est possible d’acquérir son Pixel en kit. Complet, puisque l’aile elle-même est en pièces détachées. Pour le XC, on gagnera tout de même 2 200 € et une parfaite connaissance de sa machine. Sullivan De Sousa, jeune mécano chez ULM Découverte, en a monté trois. Nous l’avons longuement interrogé. Il compte une semaine de travailleur, du lundi au vendredi, soit une quarantaine d’heures, entre le déballage et le premier vol. Quiconque a joué au mécano étant jeune s’y retrouvera, d’autant que le manuel de montage et les conditionnements sont absolument exemplaires. Bien des fabricants de kits de trois-axes, qui vendent des tas de tubes et boulons emballés en vrac dans des sacs poubelle avec un manuel de montage traduit par « Bing » et polycopié en trois pixels (suivez mon regard), feraient bien d’en prendre de la graine. Air Création est habitué depuis longtemps au kit, qu’il vend notamment à l’export, et réfléchit, mini-scoop, au kit pour les biplaces, en France !

Chaque page du manuel de montage renvoie à une nomenclature et un code, qui est reporté sur chaque petit sachet, dans lequel se trouvent tous les éléments, vis, écrous, rondelles, rivets, etc. de la partie concernée ! Trop facile ! Il reste tout de même certains perçages à effectuer, Sullivan conseille de bien faire attention à tout ce qui est raconté dans le manuel.

Une jeune femme, fraîche pilote pendulaire, vient de finir de monter le sien. Nous en reparlerons !

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